Si vous êtes doué(e) en arithmétique, il ne vous aura pas échappé qu’on approche dramatiquement de la fin de notre tour de France à la rencontre des 15 finalistes du Prix Ricard Live Music. Avant 38 feuille d’Aglaska et Two Bunnies in Love qui clôtureront le bal, notre compte à rebours débute logiquement avec… POOM ! Un duo à la pop explosive qu’on a rencontré lundi dernier dans un décor digne de la Famille Adams.
En voilà deux qui ont bien choisi leur nom, et qui ont bien retenu la leçon de la stratégie du désir. Formé en 2008 quelque part à Paris – du côté de la porte d’Orléans me souffle-t-on – le duo de Poom compose de la french touch à tiroirs, tantôt en lorgnant du côté de Daft Punk, tantôt du côté d’Exotica ; et le tout avec une dose de sérieux second degré qui permet d’oublier que Camille et Siegfried approchent de la trentaine.
En parlant de vieillissement, le réveil est rude ce matin. La veille, on s’est tapé 6 heures de route pour rallier Paris après une rencontre avec Neeskens, et la nuit a été plus courte qu’une chanson de Fauve. Bref. Aujourd’hui c’est lundi et pour arriver au Comptoir Général, lieu de rendez-vous fixé par Poom pour la session, on a l’impression d’avoir rampé pendant dix heures d’affilée à la force des avant-bras. En gros et pour la faire courte, cette treizième journée ressemble à une fusion cathodique entre Koh Lanta et La Nouvelle Star. Ne zappez pas, on revient tout de suite après la coupure pub.
Poom, ça rime avec boum. Alors que nous arrivons au Comptoir Général, étrange concept store décrit comme un ghetto muséum, le groupe est déjà installé et répète le morceau choisi, Les voiles. Derrière eux, un orgue imposant tout droit sorti des années 2020, et renommé par le groupe la « Poom Box ». Petit miracle de pyrotechnique sonore, il s’agit d’un orgue portable – faut le dire vite, le bastringue pèse 100kg – construit sur mesure pour le groupe, et capable d’interagir avec les notes jouées grâce à des diodes fluorescentes. On n’a jamais vu ça. « La Poom Box, en fait c’est une sorte d’orgue Transformer ! » confie Camille. Au sommet brille l’emblème du groupe, une licorne qui ressemble étrangement, pour ceux qui ont justement plus de trente ans, à l’insigne des Cosmocats, célèbre dessin animé des années 80. D’ailleurs c’est étrange, mais le groupe ne connaît pas les Cosmocats. La musique de Poom, très marquée eighties, renvoie-t-elle à l’enfance et donc aux dessins animés ? Tout à fait répond le groupe. Et c’est même mieux que ça, puisque le père de Siegfried n’est autre que… Cyril de Turckheim, soit le compositeur des musiques de Cat’s Eyes, Les Tortues Ninja ou Denver le dernier dinosaure. Le son des années 80, Siegfried est donc tombé dedans quand il était petit : « j’ai grandi avec un père dans son studio avec des tas de synthé, qui passait ses journées à expérimenter pour écrire les génériques des dessins animés ». En bon geek connaisseur, Rod tire la langue vers le bas comme dans un Tex Avery : « t’es mon copain pour la vie, le générique de Cat’s Eyes fait partie de mon top 3, il est hyper complexe harmoniquement ! ». Bam. Poom !
Avec tout ce laïus d’introduction, on aura bien compris que le duo lorgne plus du côté de Versailles que de Bobigny, que leurs mélodies évoquent plus le fantasme pop que la réalité urbaine. L’origine du groupe ? Les deux se sont rencontrés en école d’art, alors que Siegfried venait de créer le groupe La Classe – autre finaliste du Prix – autour de 2008. Et depuis, accompagné par Camille, il se consacre pleinement à Poom, avec pour ambition de militer contre le laisser-aller esthétique.
Pendant que je vous raconte tout cela, Poom est en train de chanter son morceau Les voiles, et ça rappellerait presque nos gouters d’enfance, ambiance disco. Et puisqu’on en parle, ledit morceau se termine ainsi : « On met les voiles / Ce soir on va danser / Compter les étoiles / Sans soucis du passé ». Peur de la nostalgie, camarades ? Non. Le groupe baigne simplement dans ses références, et pas forcément dans le second degré. « On a envie d’être pris au sérieux » dit Camille. Poom joue donc très sérieusement une musique très légère et s’avoue fan d’EdBanger, visuellement et musicalement. Alors qu’on s’apprête à mettre les voiles, justement, Camille confie à un Rod tout émoustillé qu’elle a peut-être des jeux Megadrive pour lui, planqués au fond de la cave… Pas nostalgiques, c’est sûr, mais rétro-maniaques, c’est une évidence. Boucle bouclée.
(PLUS OU MOINS) TROIS QUESTIONS EXPRESS À POOM
Qu’espérez-vous du prix Ricard S.A. Live 2014 ?
Siegfried : Au départ c’est Léonard, un des membres de La Classe, qui a eu l’idée, et donc avec Poom on en a fait de même. Ce qui nous a attiré, ce sont les lives proposés. Et comme on a tout construit autour des concerts, il faut qu’on s’entraine, qu’on se rode, c’est excitant.
Et hormis vous (évidemment), quel groupe mérite le plus de gagner cette année ?
Poom : Sans hésitation – et sans surprise – pour La Classe. Parce qu’ils produisent des sonorités qu’on n’a pas l’habitude d’entendre, que les musiciens sont top et qu’il y a une super bonne vibe dans ce groupe. Dans les duos, il y a aussi Kiz et Holy Two.
Votre argument choc pour séduire le jury ?
Camille : Entre le père de Siegfried qui a composé le générique de Cat’s Eyes et moi qui possède des jeux Megadrive, je crois qu’on tient la corde sur la corruption du jury, ah ah ah – au moins pour Rod.