La nouvelle sélection du Fair est tombée en septembre dernier. Et qui dit nouvelle sélection, dit nouvelle série de vidéo avec Rod Le Hiboo et les lauréats. Des vidéos et des groupes que nous vous présenterons tout au long de nos articles « L’artiste Fair du moment ». Et cette année, c’est avec Cabadzi que nous commençons, Cabadzi, groupe à tendance Hip Hop, que nous avions été ravis de retrouver dans la sélection 2013 – une sélection qui contient aussi Milk Coffe & Sugar et Odezenne, et qui laisse une très belle place au rap.
« Vos oreilles ont chaud et vous n’y comprenez plus rien » : C’est sur ces mots que commence la chanson « Digère et recrache » (qui donne aussi son nom au premier album de Cabadzi). Mais, quitte à avoir les oreilles qui saignent, on préfère que ce soit les beats de Cabadzi qui nous assaillent plutôt que les piaillements du monde.
Groupe nantais composé d’un chanteur/auteur, d’une violoncelliste/chanteuse, d’un beatmaker, et d’un trompettiste, Cabadzi affiche une formation originale. Si celle-ci ne constitue pas le principal intérêt du groupe – non seulement on sent qu’il ne cherche pas à être original pour être original, mais surtout les chansons fonctionneraient tout aussi bien sous un autre format –, il faut bien avouer qu’elle reste une curiosité qui attire l’oreille. Pas de guitare (mais parfois un ukulélé), pas de batterie mais un métronome humain, pas d’électronique mais une trompette qui transcenderait n’importe quelle nappe de clavier.
A composition de groupe improbable, chansons inclassifiables. Si Cabadzi ne peut cacher son affiliation hip hop, il peut aisément en sortir et tournicoter autour du slam, de la chanson française voir du spoken word, le tout avec parfois une rage plus rock. Rien n’est prémédité chez eux et tout est possible. Chaque chanson de leur album « Digère et recrache » peut devenir autre chose, comme « Princesse » qui se transforme rapidement en conte plus qu’en chanson. Comme on le disait, les nantais font une musique qui ne se contente pas de tout miser sur leur non-conformisme. Sur « Avant Eux », on oublie rapidement que le violoncelle et le beatbox sont les moteurs, on ne retient que la puissance, comme s’il s’agissait d’un hip hop boosté par des guitares imaginaires qui voulait haranguer les foules.
Autre facette importante de Cabadzi : l’engagement politique, ou plutôt l’engagement social. Car, s’il ne s’agit pas d’un groupe qui prêche ou qui fait la morale, leurs chansons servent clairement à extérioriser (lorsque ce n’est pas vomir) leur agacement contre la société. Les gens qui parlent pour ne rien dire, la télé qui tourne en fond, tout cela débouche sur des « A quoi bon défiler dans les rues, Quand on vote comme un con ».
Lorsque le groupe se fait musicalement plus gai comme sur « J’aime pas Noël », il revêt une nouvelle facette inattendue, celle d’un Java rageur où le flow rappelle définitivement celui de R Wan. Mais, la majorité du temps, quelque-soit la musique, c’est de la tristesse et des déceptions qu’on prend dans les dents, l’instrumentation étant justement là pour créer un contre poids idéal et parfois déplacer ailleurs les émotions.
Face à cet univers sombre, il était passionnant de pouvoir filmer le groupe en dehors de sa zone. La session réalisée par Rod dévoile un groupe presque timide dont le combat vient de l’intérieur. La caméra joue avec les ombres et avec les contre-champs, le cercle se déforme et reforme, « Lâchons-les » mis à nu résonne de manière encore plus forte, encore plus intime. On espéra que ça vous plaira autant qu’à nous.